Obama : ce Noir qui change l'Amérique
Il y a encore plus de vingt ans, l'idée
même qu'un Noir puisse concourir pour la Maison Blanche aurait été
saugrenue. Aujourd'hui, la rapide ascension de Barack Obama dans la
foulée de son succès lors des caucus de l'Iowa ouvre peut-être une
nouvelle page dans l'histoire des relations entre Blancs et Noirs aux
Etats-Unis.
La population de l'Iowa est en grande majorité
rurale et blanche, à l'image du New Hampshire, Etat du nord-est des
Etats-Unis dont la population est à 94% composée de Blancs, contre une
moyenne de 67% pour l'ensemble des Etats-Unis.
Selon William
Jelani Cobb, professeur d'histoire à l'université Spelman d'Atlanta et
auteur d'un récent recueil d'essais sur la culture contemporaine des
Noirs américains, la victoire d'Obama dans l'Iowa est marquante dans la
mesure où, historiquement, les premiers Noirs à s'être aventurés aux
Etats-Unis dans des domaines traditionnellement réservés aux Blancs y
sont parvenus à proposant la continuité plutôt que des réformes. Or,
Obama axe sa campagne électorale sur des projets de changement.
Mais
que l'on ne s'y trompe pas, même si l'Amérique change il y a encore de
grands progrès à accomplir : les Afro-Américains connaissent, en
moyenne, une espérance de vie inférieure à celle des Blancs, malgré le
développement d'une classe moyenne noire depuis le mouvement en faveur
des libertés civiques des années 1960. Ils continuent, en moyenne, à
gagner moins que les Blancs et la proportion d'entre eux qui est un
jour arrêtée, inculpée, emprisonnée, est plus grande que chez les
Blancs.
C'est dans les villes que ces disparités sont les plus
importantes et elles alimentent régulièrement le débat entre les
partisans des libertés civiques et ceux qui, chez les conservateurs,
estiment que les Noirs doivent régler eux-mêmes leurs propres problèmes.
La
séduction qu'exerce la personnalité d'Obama chez les électeurs blancs
tient, pour partie, à ses racines multiculturelles, étant de mère
blanche et de père kényan et ayant grandi d'abord à Hawaï puis en
Indonésie, puis de nouveau à Hawaï.
Cet aspect, de même que son
message optimiste, le distinguent des autres hommes politiques noirs et
l'aident à ne pas apparaître comme menaçant.
A l'instar du
gouverneur du Massachusetts Deval Patrick et d'autres hommes politiques
noirs, il a su prendre ses distances avec des militants historiques des
droits civiques comme Al Sharpton et Jesse Jackson, dont les croisades
portaient, avant toute chose, sur l'égalité et la justice entre les
races.
Après le New Hampshire, la prochaine grande primaire
démocrate aura lieu le 26 janvier dans un Etat du Sud, la Caroline du
Sud, où Hillary Clinton a tissé des liens étroits avec l'importante
communauté noire, majoritairement acquise, traditionnellement, aux
démocrates.
Certains électeurs âgés de la communauté noire
préfèrent soutenir Hillary Clinton, jugeant celle-ci mieux à même
d'être élue et de défendre les intérêts noirs, tandis que les jeunes
électeurs noirs, eux, affichent une préférence pour Obama.
A suivre ...